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Responsabilité pénale et civile: la CRIET déborde de son champ de compétence, selon Richard B. Ouorou

L’imbroglio juridique entourant l’affaire Steve Amoussou et ses ravisseurs, ainsi que l’implication de la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET), soulève des questions importantes sur la distinction entre la responsabilité pénale et la responsabilité civile. Boni Richard Ouorou, dans son analyse, offre un éclairage sur ces deux concepts juridiques distincts, en expliquant leurs objectifs, leurs implications, et leur pertinence dans le contexte béninois actuel.

Responsabilité pénale et responsabilité civile : deux notions juridiques distinctes

1. la responsabilité pénale : protéger la société

NDLR/La responsabilité pénale est une réponse juridique aux infractions qui nuisent à la société dans son ensemble. Elle est appliquée lorsqu’une personne viole la loi et commet un acte jugé suffisamment grave pour mériter une sanction pénale. Selon Ouorou, la responsabilité pénale a pour objectif principal de punir le délinquant et de dissuader d’autres individus de commettre des infractions similaires. Par exemple, dans l’affaire R. c. Smith au Canada, une personne reconnue coupable de vol peut se voir imposer une peine d’emprisonnement en vertu du Code criminel canadien, qui considère le vol comme une infraction grave. La sanction vise à protéger la société et à réhabiliter le délinquant.

Dans le contexte béninois, l’article 1 du Code pénal établit que toute infraction, qu’elle soit qualifiée de crime, de délit ou de contravention, entraîne des sanctions appropriées qui peuvent inclure l’emprisonnement ou des amendes. L’objectif est de maintenir l’ordre public et de garantir une société juste et paisible, comme le stipule l’article 5 du Code de procédure pénale béninois, qui réitère la nécessité de préserver la sécurité publique tout en respectant les droits fondamentaux de l’accusé.

2. La responsabilité civile : réparer les préjudices

La responsabilité civile, en revanche, concerne les litiges entre particuliers ou entités lorsqu’un dommage est causé. L’objectif est de compenser la victime pour les pertes subies, généralement sous forme de dommages-intérêts. Contrairement à la responsabilité pénale, il n’y a pas de peine de prison en cas de responsabilité civile. Par exemple, l’affaire Donoghue c. Stevenson au Canada illustre bien ce concept, où une personne blessée par un produit défectueux a poursuivi le fabricant pour obtenir une compensation financière. La responsabilité civile repose sur le principe de réparation et vise à remettre la victime dans la situation où elle se trouvait avant le dommage.

Au Bénin, le Code des Obligations Civiles et Commerciales (COCC) consacre les principes de la responsabilité civile. L’article 1382 du COCC stipule que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Cette disposition établit clairement que la responsabilité civile a pour but de réparer les préjudices causés par une faute d’autrui et de rétablir un équilibre entre les parties.

Standards de Preuve : une différence fondamentale

L’une des différences majeures entre la responsabilité pénale et civile réside dans le standard de preuve requis pour établir la culpabilité ou la responsabilité.

  • En matière pénale, le standard de preuve est très strict : il est nécessaire de prouver la culpabilité de l’accusé « hors de tout doute raisonnable ». Ce standard protège les droits de l’accusé et empêche les condamnations basées sur des preuves insuffisantes. Le Code de procédure pénale béninois, en son article 426, précise que « la charge de la preuve incombe à l’accusation et que le doute profite à l’accusé ». Cette norme élevée garantit que seuls des éléments de preuve solides et irréfutables peuvent conduire à une condamnation.
  • En matière civile, le standard de preuve est plus flexible et repose sur la « prépondérance des probabilités ». Ici, il suffit de démontrer que l’événement dommageable est « plus probable qu’improbable ». Cette différence s’explique par les objectifs distincts des deux responsabilités : la responsabilité pénale cherche à punir les comportements délictueux, tandis que la responsabilité civile vise à compenser un préjudice.

L’Affaire Steve Amoussou : un cas de conflit de compétence ?

L’affaire Steve Amoussou, dans laquelle un citoyen est enlevé et séquestré, pose un défi complexe au système juridique béninois. La situation met en lumière la nécessité de distinguer clairement les compétences de la CRIET en matière pénale et civile. La CRIET a été créée pour juger des infractions économiques et du terrorisme, mais son rôle dans des affaires à caractère civil suscite de nombreuses interrogations.

Responsabilité pénale : Si les ravisseurs de Steve Amoussou ont agi sans mandat légal, ils pourraient être poursuivis pour enlèvement et séquestration, des infractions criminelles graves. Dans ce cas, la CRIET pourrait être compétente pour juger ces infractions, en vertu de son mandat de répression des actes criminels.

Responsabilité civile : En parallèle, la victime, Steve Amoussou, pourrait également engager une action civile contre ses ravisseurs pour obtenir des dommages-intérêts en compensation des préjudices subis, tels que le traumatisme psychologique ou les pertes financières. Cependant, la question se pose de savoir si la CRIET est compétente pour traiter des affaires de cette nature. Selon l’article 5 de la loi portant création de la CRIET, cette cour a une compétence exclusive en matière de répression des infractions économiques et du terrorisme, ce qui ne couvre pas explicitement les litiges civils.

Le code de procédure pénale béninois

Pour mieux comprendre la distinction entre ces responsabilités et le cadre juridique applicable, il est utile de se référer aux textes du Code de procédure pénale béninois.

  • Article 1 du Code pénal : Il stipule que toute infraction entraîne des sanctions pénales en fonction de sa gravité. Il définit également les crimes, délits, et contraventions et les peines associées.
  • Article 426 du Code de procédure pénale : Celui-ci établit que « la charge de la preuve incombe à l’accusation », un principe qui garantit que l’accusé n’est pas condamné à moins que sa culpabilité soit prouvée « hors de tout doute raisonnable ».
  • Article 1382 du Code des Obligations Civiles et Commerciales (COCC) : Ce texte est fondamental en matière de responsabilité civile, indiquant que toute personne qui cause un dommage à autrui doit le réparer.

Ces dispositions mettent en évidence l’importance de respecter les compétences des tribunaux, de clarifier les responsabilités et d’assurer que chaque affaire soit jugée dans le cadre approprié.

La nécessité d’une clarification juridique

L’affaire Steve Amoussou et la question de la compétence de la CRIET illustrent bien les défis actuels du système judiciaire béninois. La confusion entre la responsabilité pénale et civile et l’implication de la CRIET dans des affaires de nature potentiellement civile soulèvent des questions sur la transparence et l’équité des processus judiciaires.

Pour préserver l’intégrité du système judiciaire béninois, il est crucial de maintenir une séparation claire entre les responsabilités pénales et civiles et de s’assurer que chaque tribunal exerce son mandat conformément à la loi. Cette distinction est essentielle pour garantir que la justice soit rendue de manière juste et équitable, en protégeant les droits des accusés tout en assurant une réparation adéquate pour les victimes.

La réflexion de Boni Richard Ouorou souligne la nécessité d’une éducation juridique accrue pour le grand public et les professionnels du droit, afin de naviguer efficacement dans un système complexe et de protéger les droits fondamentaux des citoyens béninois.

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LE TEXTE DE RICHARD BONI OUOROU

Chers amis, afin de vous fournir des matériaux pour construire une bonnes analyses face a l’actualité judiciaire, je vous prie de lire attentivement ce qui suit et de vous approprier les notions suivantes. Celle de la responsabilité pénale et la responsabilité civile en droit.

La responsabilité pénale et la responsabilité civile sont deux concepts distincts en droit, chacun ayant ses propres implications et objectifs.

Responsabilité pénale

La responsabilité pénale concerne les infractions à la loi jugées nuisibles à la société dans son ensemble. Lorsqu’une personne est déclarée coupable d’un crime, elle peut être sanctionnée par des peines telles que l’emprisonnement, des amendes ou d’autres mesures restrictives. L’objectif principal est de punir le délinquant et de dissuader d’autres personnes de commettre des infractions similaires.

Exemple au Canada :

Dans l’affaire R. c. Smith, une personne reconnue coupable de vol pourrait se voir imposer une peine d’emprisonnement. Selon le Code criminel canadien, le vol est une infraction criminelle qui peut entraîner des peines de prison. La sanction vise à protéger la société et à réhabiliter le délinquant.

Toujours au Canada, selon le juge Lamer dans l’affaire R. c. M. (C.A.), [1996] 1 R.C.S. 500, l’objectif est de « maintenir une société juste, paisible et sûre ».

Responsabilité civile

La responsabilité civile, en revanche, concerne les litiges entre particuliers ou entités où un dommage a été causé. L’objectif est de compenser la victime pour les pertes subies, généralement par le biais de dommages-intérêts. Contrairement à la responsabilité pénale, il n’y a pas de peine de prison.

Exemple au Canada :

Dans l’affaire Donoghue c. Stevenson, qui a inspiré le droit canadien, une personne blessée par un produit défectueux pourrait poursuivre le fabricant pour obtenir une compensation financière pour ses blessures.

La Cour suprême du Canada, dans l’affaire Saadati c. Moorhead, 2017 CSC 28, a affirmé que la responsabilité civile vise à « réparer les dommages causés par la faute d’un autre ».

Il est important de souligner la distinction dans les procédures et les standards de preuve entre la responsabilité pénale et civile.

En matière pénale :

Le standard de preuve est « hors de tout doute raisonnable », ce qui signifie que la culpabilité de l’accusé doit être prouvée de manière convaincante et sans ambiguïté.

Responsabilité civile :

Le standard de preuve est « la prépondérance des probabilités », ce qui signifie qu’il doit être plus probable qu’improbable que le défendeur soit responsable du dommage.

Exemple pratique

Supposons qu’une personne cause du tort à autrui en l’enlevant et en le séquestrant puis le remettant à un tribunal sans mandat:

Responsabilité pénale :

Cette personne pourrait être poursuivie pour enlèvement et séquestration mis en danger de la vie d’autrui sans mandat judiciaire , une infraction criminelle pouvant entraîner une peine d’emprisonnement.

Responsabilité civile :

La même personne pourrait être poursuivie par la victime pour obtenir des dommages-intérêts couvrant les dommages causés par son acte.

En résumé, bien que la responsabilité pénale et civile puisse concerner un même événement, elles ont des objectifs, des procédures et des conséquences juridiques différentes. Notre système juridique béninois doit veiller à ce que chaque type de responsabilité soit traité dans le cadre approprié pour garantir justice et équité.

À cet effet, il est pertinent de se demander si la CRIET est compétente pour juger une affaire non pénale et, si elle l’a jugée au civil, pourquoi le jugement d’une affaire non pénale est-il assorti d’une peine de prison ?

Prenez soin de vous,

Boni Richard Ouorou ❤

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