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Parodie/Le jour où le Chef Canton Talokpémi a perdu sa place

Dans la cité de Baglo, une parodie au vitriol signée Charly Teddy décrit la chute symbolique du chef Canton Talokpémi, prisonnier de son arrogance et de son mépris. Entre satire et morale sociale, cette fable moderne écorche les abus de pouvoir et les décalages entre élites et populations.

Un réveillon de grâce qui tourne à l’arrogance

NDLR/À Baglo, la fête annuelle du réveillon du jour de grâces est bien plus qu’un événement festif : c’est une tradition sacrée où le Régent Ouendo Mabou incarne la bienveillance en ouvrant les portes de sa résidence à tous, riches comme pauvres. Cette année-là, la responsabilité d’organiser cette célébration incombe au chef Canton Talokpémi, tout juste désigné à un poste de gestionnaire des affaires courantes.

Cependant, dès sa nomination, Talokpémi se laisse emporter par un sentiment de grandeur démesuré. La gestion de la collecte de la taxe sur les ordures lui monte à la tête, au point qu’il modifie sans consultation les règles du réveillon. La population de Baglo, jadis choyée, est exclue au profit de cercles élitistes et de privilèges monnayés.

Les baglolais relégués à la marge

Talokpémi décide de réserver l’événement à une poignée d’élus triés sur le volet. Une annonce placardée dans la cité scelle l’exclusion des habitants ordinaires. Les « grâces » se monnayent désormais en billets de banque, privant les Baglolais d’un moment traditionnellement inclusif.

Cette décision choque une population déjà accablée par les abus de pouvoir et l’arrogance du chef. Les murmures de mécontentement deviennent une rumeur persistante, amplifiée par la vision d’une fête autrefois collective transformée en vitrine de richesse et d’influence.

Le complot du Régent : une leçon magistrale

Le jour du réveillon, le Régent Ouendo Mabou joue une carte inattendue. Il missionne Talokpémi pour accueillir un invité prestigieux, l’Excellence Bakpo, en dehors de la cité. Le chef, flatté par cette demande, se précipite pour remplir son devoir. Cependant, l’attente s’éternise, et l’invité ne se manifeste jamais.

Pendant ce temps, le Régent orchestre un retournement spectaculaire : il rouvre les portes du réveillon à la population de Baglo, restituant l’événement à ceux qui en avaient été exclus. Les rires et les festivités remplissent la résidence, tandis que Talokpémi, éreinté et humilié, revient trop tard pour être admis.

Une fin aussi comique que tragique

Aux premières lueurs du jour, Talokpémi, assoupi devant les portes closes, est réveillé par les invités quittant la fête. Parmi eux, les Baglolais, jubilants, affichent des sourires moqueurs et revanchards. L’ironie de la situation est palpable : celui qui les avait exclus se retrouve lui-même mis à l’écart.

Charly Teddy, par ce récit, propose une critique mordante des abus de pouvoir et de l’arrogance des élites. Talokpémi, enflé d’orgueil, est ramené à la réalité par la justice subtile du Régent. La leçon est claire : le mépris des humbles finit par se retourner contre ses auteurs.

Satire et morale : une fable contemporaine

À travers cette parabole, Charly Teddy pose un regard acerbe sur les dérives des petits pouvoirs mal gérés. Le chef Canton Talokpémi devient l’archétype du responsable qui confond service et domination, éloigné des réalités du peuple qu’il est censé servir.

Le texte, sous ses allures humoristiques, rappelle une vérité universelle : l’arrogance des dirigeants est souvent le prélude à leur chute. En excluant les siens, Talokpémi a scellé son propre sort. Cette chute symbolique, orchestrée avec finesse par le Régent Ouendo Mabou, résonne comme un appel à l’humilité et à la justice sociale.

Une satire aux résonances profondes

Charly Teddy, en jouant sur les codes de la parodie, invite à une réflexion sur les travers des dirigeants modernes. Le récit du chef Canton Talokpémi transcende la simple anecdote pour devenir une métaphore des abus de pouvoir et de la déconnexion entre gouvernants et gouvernés.

Dans un style mordant et imagé, cette satire met en lumière l’importance de rester fidèle aux valeurs de justice et d’inclusion. À Baglo comme ailleurs, les dirigeants devraient se rappeler que leur pouvoir n’est qu’un service rendu au peuple – sous peine de perdre à la fois leur place et leur honneur.

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Le texte de Charly Teddy

Le jour où le chef Canton Talokpémi a perdu sa place.

Dans la cité, jadis paisible, de Baglo, le réveillon du jour de grâces chez le Régent Ouendo mabou est un événement connu et couru.

Tous ceux qui comptent dans la cité et des invités de marque venus des cités voisines s’y pressent.

C’est aussi le moment où les circonstances font grâces aux moins nantis qui y sont accueillis dans une bienveillance et une générosité mémorables.

Cette année là, c’est au chef Canton Talokpémi, nouvellement désigné pour gérer quelques affaires courantes de la cité, dont la collecte de la taxe sur les ordures, qu’est  confiée l’organisation du réveillon du jour de grâces.

Et depuis, le chef Canton Talokpémi ne touche plus terre.

Lui dont la tête et les chevilles enflées, ne tiennent plus sous la coiffe et les sabots pourtant trop grands pour lui.

C’est la toute première fois qu’on entend autant les habitants de Baglo maugréer et se plaindre du mépris et des traitements que leur infligent les escouades d’affidés du chef Canton Talokpémi.

Depuis que le Régent Ouendo mabou lui a fait grâce de cette charge, la peine des baglolais est devenue un calvaire.

Sans se passer le mot, ils espèrent tous profiter de l’occasion du réveillon du jour de grâces pour s’en ouvrir au Régent Ouendo mabou.

Comme s’il s’en doutait, et peut-être pour empêcher que ne remontent jusqu’aux attentives oreilles du Régent, les incessantes récriminations des baglolais, le chef Canton Talokpémi a décidé de changer le protocole et la traditionnelle liste des invités.

Il a fait placarder sur les pans de murs de la cité de Baglo, une annonce insolente dont la teneur suit:

«RÉVEILLON DE JOUR DE GRÂCES. EN RAISON DE LA PRÉSENCE D’UN PLUS GRAND NOMBRE D’INVITÉS DE MARQUE, LES PLACES, HABITUELLEMENT RÉSERVÉES À LA POPULATION DE BAGLO, SONT LIMITÉES. UNE INVITATION PERSONNELLE SERA ADRESSÉE À CHAQUE INVITÉ RETENU.

LE CHEF CANTON TALOKPÉMI. »

Et voilà les pauvres baglolais, déjà meurtris par les brimades quotidiennes des nouveaux garde-chiourmes de la cité, qui se voient privés, pour la première fois depuis des décennies, de ce moment de grâces chéri comme la prunelle de leurs yeux.

Pendant ce temps bruisse la rumeur que des cartes d’invitation s’échangent sous les boubous et boumbas de luxe,  contre liasses de billets de banque.

Les commerçants, vendeurs de vent et rentiers, flambent à qui mieux mieux pour s’obtenir le fameux sésame d’invitation.

Au soir du réveillon, alors qu’arrivent les premiers invités, le Régent Ouendo mabou missionne en urgence le chef Canton Talokpémi d’aller accueillir un invité de marque de dernière minute, venu d’une cité voisine. C’est un invité spécial du Régent Ouendo mabou nommé Excellence Bakpo.

Au lieu dit d’accueil, plusieurs heures passent et toujours pas l’arrivée de l’hôte attendu.

De guerre lasse, le chef Canton Talokpémi rebrousse chemin pour le réveillon de grâces.

Il y arrive plusieurs heures plus tard, et trouve le portail et les accès à la résidence de la régence clos.

A l’intérieur, la fête y bat son plein.

Les éclats de joie et les vivats au Régent Ouendo mabou couvraient et rendaient inaudibles les tambours au portail du chef Canton Talokpémi qui finit par s’écrouler et s’endormir; épuisé et déprimé.

Ce sont les chahuts des invités, sortant au petit matin des festivités du réveillon de grâces, qui réveillaient le chef Canton Talokpémi.

Surtout l’air moqueur et revanchard des baglolais que le Régent avait fait ramener au réveillon de grâces, au pied levé.

Charly Teddy – 10/12/2024

La ressemblance et la coïncidence avec des faits similaires qui peuvent se produire ne sont que fortuites.

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