Le discours annuel du Président Patrice Talon sur l’état de la Nation, prononcé devant l’Assemblée nationale, a fait réagir bien des figures de la sphère politique. Parmi elles, Valentin Djenontin-Agossou, ancien ministre et député, se distingue par sa virulente critique. À travers une série de publications denses, il décortique les déclarations du Chef de l’État sur les grandes problématiques sociales, économiques et politiques. Retour sur cette passe d’armes en ces épisodes (1 et 2) et qui questionne les fondements mêmes de la gouvernance actuelle.
NDLR/Dans une partie significative de son discours, Patrice Talon a évoqué son « insatisfaction » face à la cherté de la vie et à la faiblesse du pouvoir d’achat des Béninois. Une déclaration qui, selon Djenontin, relève davantage de la rhétorique que d’une réelle prise de conscience. L’ancien député dresse un tableau sombre des politiques économiques du gouvernement, accusant le Chef de l’État d’avoir concentré les richesses et les leviers économiques entre les mains d’un cercle restreint.
Djenontin énumère une série d’actions qui, selon lui, ont exacerbé les inégalités : privatisation des entreprises publiques, suppression d’emplois massifs, marginalisation des petites entreprises et augmentation de la précarité des travailleurs. Ces mesures, argue-t-il, ne pouvaient qu’accentuer la pauvreté généralisée et réduire encore davantage le pouvoir d’achat des citoyens.
Dans un passage marquant, il interroge les décisions qui ont conduit à la suppression de mécanismes sociaux essentiels, tels que l’ONASA, qui jouait un rôle clé dans la régulation des prix des denrées alimentaires. Il dénonce également une gouvernance qui, selon lui, favorise l’importation de compétences étrangères au détriment des nationaux, creusant un fossé entre la classe dirigeante et le peuple.
Une comparaison avec le régime Boni Yayi : l’éclairage des chiffres
Un des arguments phares de Valentin Djenontin réside dans sa comparaison chiffrée entre la gestion du pouvoir d’achat sous Patrice Talon et celle de son prédécesseur, Boni Yayi. En mettant en lumière les augmentations salariales significatives et les politiques sociales ambitieuses du régime précédent, il contraste ces mesures avec celles jugées timides, voire régressives, de l’actuel gouvernement.
Sous Boni Yayi, selon Djenontin, les augmentations salariales ont atteint jusqu’à 218 % pour certaines catégories de fonctionnaires, permettant à de nombreux Béninois d’accéder à la propriété et d’améliorer leurs conditions de vie. En revanche, sous Talon, il pointe une augmentation bien plus modeste, limitée à 30 % pour le SMIG, et une revalorisation salariale globalement insuffisante pour compenser l’inflation galopante.
Les opportunités d’épanouissement : une promesse illusoire ?
Dans une autre section de son discours, Patrice Talon a affirmé que son gouvernement travaille à offrir « les meilleures opportunités d’épanouissement en fonction des efforts fournis ». Une déclaration que Djenontin réfute en s’appuyant sur deux exemples frappants : les Aspirants au Métier d’Enseignant (AME) et les agriculteurs.
Les AME : des enseignants en quête de dignité
Pour Djenontin, la situation des AME est emblématique de la précarité généralisée. Contraints de parcourir plusieurs établissements pour cumuler leurs heures, ils perçoivent des salaires qu’il juge dérisoires, oscillant entre 115 000 et 145 000 FCFA par mois. En comparaison, il rappelle que sous Boni Yayi, ces enseignants avaient été reversés à un statut permanent, bénéficiant ainsi de meilleures conditions de travail et de rémunération.
Les producteurs de soja : des acteurs économiques sacrifiés
Autre illustration de cette promesse non tenue, selon l’ancien ministre : les agriculteurs, et plus particulièrement les producteurs de soja. Djenontin décrit un système où les producteurs sont contraints de vendre leurs récoltes à des prix imposés par le gouvernement, souvent en deçà du coût de production. Cette politique, qu’il qualifie de « sorcellerie économique », profite uniquement à des entreprises proches du pouvoir, au détriment des agriculteurs et de l’État, qui perd également des recettes fiscales.
Une critique globale d’un modèle libéral à outrance
Au-delà des cas spécifiques, Valentin Djenontin dénonce ce qu’il perçoit comme les dérives d’un modèle hyper-libéral, centré sur le profit au détriment du social. Il accuse le régime Talon de sacrifier le bien-être de la population sur l’autel de l’efficacité économique, une logique qui, selon lui, s’apparente à une « clochardisation organisée » du peuple béninois.
Cette critique rejoint des inquiétudes exprimées par d’autres acteurs de la société civile et de la classe politique. Pour Djenontin, l’absence de politiques sociales robustes, combinée à une répression des syndicats et à une marginalisation des acteurs locaux, creuse un fossé de plus en plus large entre la gouvernance et les réalités quotidiennes des citoyens.
Quelle réponse pour le gouvernement ?
Face à ces accusations, le gouvernement de Patrice Talon ne s’est pas encore officiellement exprimé. Cependant, l’écho donné à ces critiques pourrait inciter l’exécutif à clarifier certaines décisions et à renforcer sa communication sur les réformes en cours. Le risque pour le régime est que ces critiques viennent nourrir un sentiment d’injustice déjà perceptible dans plusieurs secteurs.
Le discours sur l’état de la Nation, un exercice annuel d’autosatisfaction pour certains, devient sous le prisme de Valentin Djenontin une tribune pour dénoncer les maux structurels du pays. Si ses critiques sont parfois jugées acerbes, elles ont le mérite de poser un débat fondamental sur les priorités de la gouvernance : croissance économique ou bien-être social ? À l’aube d’une nouvelle année, cette croisade pourrait bien galvaniser d’autres voix critiques et remettre en question la trajectoire choisie par le Bénin sous Patrice Talon.
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DEUXIEME ET TROISIEME PARTIES DE L’ANALYSE DU DISCOURS DU CHEF DE L’ETAT SUR L’ETAT DE LA NATION 2024
Vendredi 20 décembre 2024 devant les députés au Palais des Gouverneurs à Porto-Novo, le Chef de l’Etat du Bénin, Patrice Talon a prononcé son discours sur l’état de la Nation.
DEUXIEME PARTIE : LA CHERTE DE LA VIE ET LE FAIBLE POUVOIR D’ACHAT.
1- « La cherté de la vie et le faible pouvoir d’achat du plus grand nombre d’entre nous, demeurent eux aussi pour moi, un point d’insatisfaction et de peine ».
Président, je voudrais bien vous croire, mais vous m’avez arraché tout argument. Comment la vie ne va pas être chère et le pouvoir d’achat faible quand la seule chose que vous savez mieux faire, c’est de voir vos administrés souffrir.
Quand les bonnes dames sont chassées des abords des voies où elles mènent de petits commerces pour nourrir leurs familles, quand vous avez liquidé et pris dans votre patrimoine personnel toutes les sociétés d’Etat : Carder, Sonapra, Ons, Caia, Onasa, la Sonacop, la Sobemap, le Cncb, le Libercom, etc ; quand vous avez détruit les hommes d’affaires qui employaient des milliers de béninois pour vous occuper avec votre clan de leur business ; quand vous envoyez à la retraite d’office des milliers de policiers et militaires ; quand vous rendez précaire l’emploi par une loi de main d’œuvre esclavagiste ; quand vous êtes seul propriétaire de tous les secteurs vitaux où vous êtes libre de fixer les prix de vente et d’achat ; quand vos sociétés sont exemptées de taxes et impôts alors que les petits travailleurs sont assujettis à toutes sortes d’impôts, taxes et redevances ; quand vous faites venir vos amis étrangers occuper les postes importants et stratégiques du pays avec des millions de salaire par mois alors que les nationaux sont privés de primes et accessoires ; quand les AME ne sont pas reversés et gagnent des salaires de misère avec 26 voire 30 heures de cours par semaine ; quand vous pompez toutes les ressources publiques avec le PVI ; quand vos sociétés écrans gagnent tous les marchés publics dans une opacité totale ; quand les projets les mieux financés du secteur de la santé sont pilotés par la Fondation de votre épouse ; quand les artistes nationaux talentueux sont laissés au profit des artistes étrangers que vous payez à coup de dizaines de millions ; quand les producteurs s’endettent pour produire des denrées dont vous êtes seul bénéficiaire en gagnant sur leur dos des dizaines de milliards ; quand vous expropriez les béninois de leur terre pour vous-mêmes, vos collaborateurs et amis ; quand vous prenez les domaines de l’Etat pour vos sociétés etc. ; pourquoi alors s’étonner de la misère du peuple qui est le dernier de vos soucis ?
Pourquoi s’étonner de la vie chère quand par un coup de tête, vous fermez les frontières du Bénin d’avec le Niger, privant des milliers de dockers, de transitaires et autres acteurs portuaires de travail et de ressources les plongeant dans la détresse sociale ?
2- « Est-il réaliste que, venant de si loin, nous soyons déjà tous, satisfaits de tout ? »
Monsieur le Président, de quel horizon parlez-vous ? « C’est l’hôpital qui se moque de la charité ».
– Qui est-ce qui vous a conseillé de supprimer l’Onasa qui permettait aux béninois d’acheter les produits de grande consommation à prix réduits et subventionnés en période de soudure ?
– Qui est-ce qui vous a conseillé de supprimer la gratuité de la prise en charge des dialysés par l’Etat ?
– Vous êtes un hyper libéral qui n’est préoccupé que par le profit. Vous avez volontairement choisi de faire dos au social et de clochardiser votre population.
Je ne suis pas un adepte de l’amnésie Monsieur le Président.
Venant de si loin ! Parlons un peu de la rémunération des fonctionnaires et travailleurs à travers une étude comparative de l’augmentation des salaires sous le régime précédent et le vôtre Monsieur le Président Patrice Talon.
Le régime de la rupture a pour arme de gouvernance le mensonge, oubliant que les investisseurs sérieux et toute personne curieuse pourrait avoir accès aux informations crédibles sans se déplacer grâce aux nouvelles technologies de la communication.
Sous le Président Boni YAYI, les travailleurs béninois ont eu droit, plusieurs fois à des augmentations substantielles de salaire. En 10 ans de gouvernance, certains fonctionnaires ont vu leur salaire multiplié par plus de trois. Les enseignants et les professeurs d’université peuvent en témoigner comme les agents de santé et les agents d’autres corporations.
La plupart des enseignants qui étaient sans moyen de locomotion, ont acquis des voitures. Beaucoup ont troqué le «bohoumba» (tenue locale, généralement en tissu) contre des costumes.
La majorité des fonctionnaires ont construit leur propre résidence et quitté la location.
A Porto-Novo par exemple, tout un quartier porte un nom expressif du bonheur retrouvé des enseignants sous le régime de Boni YAYI.
Le SMIG
Dans le souci de relever le niveau de vie des agents à faible revenus, trois actes fondamentaux ont été posés sous le régime YAYI :
*Par Décret N° 2007-453 du 02 octobre 2007 portant relèvement des salaires payés en dessous du montant du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) pour compter du 1er octobre 2007, le régime YAYI, un an et demi après son avènement a déjà pensé à l’amélioration des conditions de vie des travailleurs par le réajustement de leurs revenus :
• Pour compter du 1er octobre 2007, les agents de l’Etat payés en dessous du SMIG sont désormais payés au SMIG (Article 1er)
• Les agents de l’Etat payés jusque-là en dessous du SMIG ont reçu un complément de solde de manière que leurs salaires bruts indiciaires ne soient pas inférieurs au montant du SMIG (Article 2)
o En fin mars 2019, soit deux ans après l’arrivée au pouvoir de Boni YAYI, le SMIG est passé de 27.500 FCFA à 31.625 FCFA, soit une augmentation de 15%.
o Le jeudi 17 avril 2014, le communiqué du Conseil des ministres a annoncé l’adoption par les membres du gouvernement du décret portant relèvement du salaire minimum.
Ainsi, par Décret N° 2014-292 du 24 avril 2014 portant relèvement du Salaire minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG), le salaire minimum est relevé de 26,48% passant de 31.625 FCFA à 40.000 FCFA à compter du 1er mai 2014.
Il résulte de ces augmentations successives que le SMIG sous le régime de YAYI Boni est passé de 27.500 FCFA à 40.000 FCFA soit une augmentation de 45,45% largement au-dessus de 30% d’augmentation sous votre présidence après 8 ans de pouvoir.
Sous le régime de la rupture du Président Patrice TALON, contrairement aux déclarations mensongères du Ministre des finances Romuald WADAGNI au Brésil « En décembre 2023, le Bénin a procédé à l’augmentation la plus forte de toute notre histoire. Les salaires les plus bas ont connu une augmentation de plus de 40% », l’augmentation du SMIG sous le Président Patrice TALON n’a été que de 30% faisant passer le SMIG de 40.000FCFA à 52.000FCFA à compter du 1er janvier 2023.
L’annonce a été faite par le gouvernement à l’issue du Conseil des ministres du mercredi 7 décembre 2022.
C’est ainsi que le Décret N°2022-692 du 07 décembre 2022 portant relèvement du SMIG a été pris.
« Le Salaire minimum interprofessionnel garanti est relevé de quarante mille (40.000) francs CFA à cinquante-deux mille (52.000) francs CFA, soit une augmentation de 30% à compter du 1er janvier 2023. » (Article 1er dudit décret signé pourtant du Ministre de l’Economie et des Finances, Ministre d’Etat, Romuald WADAGNI).
Augmentation de salaire dans la fonction publique.
Ici, je prends l’hypothèse que la déclaration du ministre des Finances WADAGNI au Brésil se rapportait à l’augmentation de salaire au profit des fonctionnaires en général et non spécifiquement au SMIG.
Si tel est le cas, le Ministre a dit des contre-vérités : les salaires sous le Président Patrice TALON n’ont pas connu une augmentation de plus de 40%. Evitons une fois de bon les amalgames.
En effet, la seule augmentation de salaire dont ont bénéficié les agents de l’Etat sous votre régime, monsieur le Président Patrice TALON est de 3%. Ladite augmentation a été consacrée par le Décret N° 2022-700 du 07 décembre 2022 portant revalorisation du point indiciaire de 3% pour compter du 1er décembre 2022.
Par ailleurs, par Décret N° 2022-701 du 07 décembre 2022 portant institution de sursalaire au profit des agents de l’Etat pour compter du 1er décembre 2022, votre gouvernement a institué une forme de prime dénommée sursalaire.
Ce sursalaire n’est pas à confondre avec une augmentation traditionnelle de salaire par valorisation du point d’indice puisque ce sursalaire n’accompagne pas les agents à la retraite. Il pourrait même être supprimé en cas de difficultés accentuées de trésorerie du moment où les syndicats sont réduits impuissants par la quasi-suppression du droit de grève, arme redoutable dont ils se servaient contre les régimes précédents parce que manipulés pour la plupart par vos soins.
Par une note circulaire conjointe signée du ministre d’Etat chargé des finances et du ministre de la Décentralisation, votre gouvernement a autorisé l’application de ces décrets au profit des agents des collectivités territoriales décentralisées à compter du 1er décembre 2022.
En termes clairs, ce sursalaire est la restauration partielle des nombreuses primes supprimées aux agents de l’Etat par le régime de la rupture. A ce titre, l’article 2 dudit décret est explicite : « L’octroi du sursalaire est détaché du grade et de la fonction de l’agent de l’Etat. Il est basé sur le revenu net de l’agent. »
Pour mémoire, le régime de la rupture, à son avènement, a supprimé la quasi-totalité des primes et indemnités dont bénéficiaient les agents de l’Etat sous le régime de YAYI Boni.
Au total, l’affirmation du Ministre WADAGNI selon laquelle, les agents de l’Etat ont connu une augmentation de salaire de plus de 40% est totalement fausse.
J’espère que les centrales syndicales ne vont pas continuer à se rendre complices par leur silence prolongé de ce mensonge que vous avez amplifié le vendredi 20 décembre 2024 devant les députés à l’Assemblée nationale.
Est-ce que le gouvernement de la rupture a encore une conscience lorsqu’il s’acharne à se comparer à chaque occasion au régime de YAYI ? Sans fausse modestie, c’est le jour et la nuit.
En matière de l’amélioration des conditions de vie des agents de l’Etat, tous les fonctionnaires en général, en service ou à la retraite ont en mémoire les différentes augmentations de salaire reçues sous le régime YAYI et qui les ont accompagnés à la retraite.
Globalement les taux d’augmentation de salaire sous le régime YAYI se présentent comme suit :
– Les personnels non enseignant de l’Etat : 43% ;
– Les enseignants du primaire et du secondaire : 68% ;
– Les maîtres-assistants des universités : 165% ;
– Les maîtres de conférences des universités : 198% ;
– Les professeurs titulaires des universités : 218%.
DJENONTIN-AGOSSOU Valentin
Ancien Ministre,
Député élu, 7ème législature.
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ANALYSE DU DISCOURS DU CHEF DE L’ETAT SUR L’ETAT DE LA NATION 2024.
Vendredi 20 décembre 2024 devant les députés au Palais des Gouverneurs à Porto-Novo, le Chef de l’Etat du Bénin, Patrice Talon a prononcé son discours sur l’état de la Nation.
TROISIEME PARTIE : LES MEILLEURES OPPORTUNITES D’EPANOUISSEMENT EN FONCTION DES EFFORTS FOURNIS.
« …… Mais ensemble nous construisons jour après jour le pays, afin qu’il offre à chacun, à terme, les meilleures opportunités d’épanouissement en fonction des efforts fournis ».
Monsieur le Président, vous professez l’idéal qui est sans commune mesure avec la réalité que vous faites vivre à vos concitoyens. Pour ne pas ennuyer mes lecteurs et auditeurs, je me limiterai seulement à deux exemples pour tester votre postulat de « meilleures opportunités d’épanouissement en fonction des efforts fournis ».
1- Les Aspirants au Métier d’Enseignant (AME) du secondaire.
Cette catégorie d’enseignants à statut précaire n’existait plus dans un passé récent que vous qualifiez de honteux, sous votre prédécesseur, Docteur Boni YAYI parce qu’il les avait tous reversés et ils sont des enseignants avec un statut respectueux.
Avec vos supposées prouesses, non seulement les écoles et universités n’ont pas connu de nouvelles infrastructures, mais celles qui existaient avant votre arrivée ont été supprimées dans certaines localités. Malgré ce rétrécissement, vous êtes incapable de pourvoir nos écoles d’enseignants permanents.
Les AME qui sont contraints de faire 26, 28 voire 30 heures de cours par semaine, sont obligés de parcourir plusieurs collèges en quête de réunir la masse horaire exigée. Ce nomadisme expose certains à des accidents de la voie publique, d’autres à des maladies et fatigues insupportables.
Monsieur le président, savez-vous que malgré ces tracasseries, ces charges horaires de travail, ils sont encore après les différentes améliorations à :
• Licence/Duel : 115.000 Fcfa ?
• Licence professionnelle/Maîtrise/Bapes : 125.000 Fcfa ?
• Master professionnel/Capes : 145.000 Fcfa ?
Avec la vacation, est-ce que ces professeurs ne gagnaient-ils pas plus d’argent ?
Monsieur le Président, les AME ne fournissent-ils pas encore assez d’effort pour bénéficier de meilleures opportunités d’épanouissement ?
2- Les agriculteurs.
Ici, je me limite juste au cas du soja afin que l’opinion se fasse sa propre religion du discours du chef de l’Etat et la réalité des faits.
Entre les agriculteurs et les entreprises industrielles transformatrices de la GDIZ à Golo, qui fournit plus d’efforts et mérite les meilleures opportunités d’épanouissement ?
Sans subvention et sans assistance de l’Etat, l’agriculteur fait seul face à toutes les charges et peines pour produire le soja : défrichage, labour, semis, sarclage, récolte, égrenage, transport.
Comme si ces efforts ne suffisaient pas, après avoir posé des pierres et creusé des tranchées sur les pistes rurales ; non seulement les sojaculteurs sont tenus de vendre leur production à une seule entreprise, mais également, on leur fait l’obligation d’aller à la douane retirer une fiche de convoyage avant de déplacer le soja du champ à la maison ou au magasin.
Le prix de vente leur est de surcroît imposé par le Conseil des Ministres en dessous de la moyenne pratiquée par les collecteurs dans la sous-région.
Pour tromper l’opinion, on a récemment fabriqué une interprofessionnelle avec des vendus du secteur pour soumettre leurs paires à la volonté de l’exploiteur.
Pour davantage contrer les velléités d’émancipation des agriculteurs, l’Institut de Recherche sur le Coton (IRC) a, par Note de conjoncture N° 001-2022-AIC/IRC portant contraintes relatives à l’atteinte des objectifs de production de coton graine campagne 2022-2023, ciblé la concurrence du soja.
Il faut donc multiplier les entraves à l’épanouissement financier des producteurs du soja pour les contraindre à retourner à la production du coton pour le bien-être de l’empire du chef.
Examinons la situation à travers les chiffres.
– Le prix théorique d’achat fixé par le Conseil des ministres du 11 décembre 2024 est de 275 FCFA par kg du soja grain conventionnel avec l’obligation faite aux producteurs d’acheminer la totalité de leur production au niveau des magasins de regroupement.
– Le coût de production.
Suivant les estimations des structures faîtières, sur la base d’un rendement de 1200 kg par hectare, le coût de production du soja est estimé à 255 Fcfa par kg.
– Le coût du rapprochement du produit est estimé à 28 Fcfa par kg (Enquête TRAVERA Bénin, 2018).
Il en résulte que le prix de production pour l’agriculteur revient à 255 Fcfa + 28 Fcfa, ce qui fait 283 Fcfa par kg.
– Perte subie par le producteur.
A un prix de vente imposé et fixé par le Conseil des ministres à 275 Fcfa le kg de soja graine conventionnel, le producteur avec le prix de production de 283 Fcfa par kg, perd 8 Fcfa par kg.
– Le prix bord champs pour le Gouvernement peut être estimé à 247 Fcfa par kg (275F – 28F)
– Prix d’achat proposé par les collecteurs : 400 Fcfa.
Pendant que les collecteurs proposent d’acheter chez les producteurs le soja graine conventionnel à 400 Fcfa en moyenne le kg (prix bord champ), le gouvernement impose aux producteurs le prix de 247 Fcfa par kg (prix bord champ), soit un manque à gagner de 153 Fcfa par kg de soja.
– Perte enregistrée par les producteurs.
Pour une production moyenne de 450.000 tonnes par an, le montant de la perte financière enregistrée par les producteurs est évalué à 153*450.000*1000 soit 68.850.000.000 F CFA.
Cette manne profite à quelques individus qui n’ont jamais vu la couleur du soja dans les champs, juste parce qu’ils détiennent le pouvoir de décision de l’Etat qu’ils usent à leur profit.
– Perte enregistrée par l’Etat.
La loi N° 2022-33 du 09 décembre 2022 portant loi de finances gestion 2023 a fixé la redevance à l’exportation du soja à 140 Fcfa par kg à compter du 1er janvier 2023. Curieusement, aux regards des dispositions de la loi de finances gestion 2025 , le nouveau mécanisme de commercialisation dispose que les entreprises industrielles transformatrices du soja sont autorisées à exporter sans taxes et droits de douane le stock non transformé à la fin de la saison et avant la campagne suivante.
Tenant compte de cette nouvelle disposition, et de la redevance à l’exportation de 140Fcfa par kg ; avec la production moyenne de 450.000 tonnes par an, le manque à gagner pour l’Etat est estimé à 140*450.000*1000 soit 63.000.000.000 Fcfa.
– En définitive, sur le dos des producteurs et de l’Etat, quelques individus en position dominante gagnent en toute tranquillité la faramineuse somme de 68.850.000.000Fcfa + 63.000.000.000 Fcfa soit 131.850.000.000 Fcfa.
Excellence Monsieur le président de la République, outre les conséquences sociales de perte d’emploi d’environ 30.000 agents autrefois employés dans la chaîne, voudriez-vous bien expliquer aux compatriotes, qui des privilégiés de la République qui empochent gratuitement environ 132 milliards et les producteurs du soja qui perdent environ 69 milliards, ont le droit de bénéficier des meilleures opportunités d’épanouissement en fonction des efforts fournis ?
Vivement que les ministres en charge de l’Agriculture, des Finances, du Commerce, du Travail ainsi que les ministres conseillers des divers secteurs viennent nous expliquer cette sorcellerie qui fait plus de mal aux citoyens sur leur territoire que celle qu’avaient subi leurs aïeux en esclavage dans les plantations de leurs maîtres d’antan.
DJENONTIN-AGOSSOU Valentin
Ancien Ministre,
Député élu, 7ème législature.