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LIBRE OPINION : Un code électoral sans fondement juridique valable

À l’approche des élections de 2026, le Bénin fait face à un tournant décisif. Un code électoral contesté, issu d’une réforme jugée illégitime, menace la souveraineté populaire. Faut-il accepter ce cadre vicié ou résister pour défendre la démocratie ? Dans cette libre opinion, M.K.L., administrateur à la retraite et observateur engagé, analyse les dangers de cette confiscation du pouvoir et appelle les citoyens à une prise de conscience. «Nul peuple libre ne peut rester passif face à l’injustice », prévient-il. Lire son analyse.

En tant qu’administrateur à la retraite, observateur averti de la vie sociopolitique et citoyen profondément engagé, je ressens le devoir de partager cette libre opinion afin de contribuer au débat public sur l’avenir démocratique de notre cher pays, le Bénin. À l’approche des élections générales de 2026, nous assistons à une crise institutionnelle inquiétante, où les principes fondamentaux de la démocratie et de l’État de droit sont mis à mal par un code électoral contesté. Face à cette situation, je prends la parole non par complaisance ni par militantisme partisan, mais par devoir de vérité et d’alerte. Cette tribune vise à exposer les incohérences juridiques et politiques de ce code électoral, à démontrer comment il confisque la souveraineté populaire et à appeler les citoyens à une prise de conscience collective. Car nul peuple libre ne peut accepter de voir son destin confisqué par des lois injustes et illégitimes. L’histoire du Bénin est faite de combats pour la démocratie, et il appartient à chaque citoyen de se lever pour préserver les acquis durement obtenus.

M.K.L.

Une démocratie sous tension : entre manipulation et résignation

Le Bénin, autrefois salué comme un modèle démocratique en Afrique, semble aujourd’hui s’enfoncer dans une crise institutionnelle préoccupante. À l’approche des élections générales de mai 2026, un débat majeur secoue l’opinion publique : l’inapplicabilité et la légitimité du code électoral récemment adopté. En dépit de critiques virulentes émanant de juristes, d’hommes politiques et de la société civile, Boni Yayi et Patrice Talon, deux figures majeures du paysage politique béninois, s’entendent pour imposer un cadre électoral jugé invalide et vicié.

Derrière ce code électoral se cachent des enjeux bien plus vastes : une confiscation du pouvoir, une instrumentalisation du droit et une volonté d’étouffer toute contestation démocratique. Le peuple béninois, longtemps acteur de sa propre destinée, se retrouve aujourd’hui otage d’un système politique verrouillé qui, sous prétexte de modernisation, remet en cause les principes fondamentaux de la souveraineté populaire. Le droit est censé être un rempart contre l’arbitraire, mais que devient-il lorsque ceux qui en sont garants le détournent à des fins partisanes ? En 2019, une réforme constitutionnelle controversée a été adoptée sans un consensus national, donnant naissance à un code électoral contesté. Ce texte, censé régir les élections de 2026, est juridiquement inapplicable pour plusieurs raisons :

  1. Il découle d’une loi elle-même déclarée nulle par une juridiction supranationale.
    • La Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, dans un arrêt de décembre 2020, a annulé la réforme constitutionnelle de 2019 qui avait profondément modifié les règles du jeu électoral.
    • Par conséquent, toutes les lois et institutions qui en découlent sont frappées de nullité absolue.
  2. Un simulacre de démocratie et une manipulation des institutions
    • Ce code électoral sert les intérêts d’une minorité au pouvoir et écarte les opposants politiques à travers des critères d’éligibilité restrictifs.
    • La création d’un cadre électoral sur mesure consacre un pouvoir absolu, où les résultats des élections sont connus d’avance.

Ainsi, le Bénin est aujourd’hui dirigé par des normes illégitimes, fondées sur une Constitution qui n’a plus de base légale. Ce constat souligne une crise profonde de l’État de droit, où la volonté d’un homme ou d’un groupe prime sur les principes fondamentaux de justice et d’égalité.

La confiscation de la souveraineté populaire

Si la Constitution de 1990, adoptée après une Conférence nationale historique, représentait l’expression de la volonté du peuple béninois, le code électoral actuel n’est que l’œuvre d’une poignée d’acteurs politiques soucieux de préserver leurs privilèges. Les élections devraient être le socle de la démocratie ; elles permettent aux citoyens de choisir librement leurs dirigeants. Or, en 2026, les Béninois risquent de se retrouver face à un processus biaisé, où les règles du jeu sont imposées sans leur consentement.

Plus grave encore, les organes en charge du processus électoral sont eux-mêmes contestés :

  • La Commission Électorale Nationale Autonome (CENA) et la Cour Constitutionnelle, censées garantir l’impartialité des élections, sont devenues des instruments politiques au service du pouvoir en place.
  • La marginalisation de l’opposition et de la société civile empêche toute alternative crédible, verrouillant ainsi l’espace démocratique.

Si un peuple n’a plus le pouvoir de décider librement de son avenir politique, alors la démocratie devient une illusion.

Une opposition complice ou impuissante ?

Face à cette situation, une partie de l’opposition semble jouer un double jeu. D’un côté, elle dénonce la fraude électorale en gestation. De l’autre, certains de ses leaders participent au processus électoral, légitimant ainsi un cadre qu’ils contestent. Le cas du parti « Les Démocrates » de Boni Yayi est particulièrement révélateur. Après avoir dénoncé la réforme constitutionnelle de 2019, ce parti a tout de même pris part aux élections législatives de 2023 et pourrait encore valider les élections générales de 2026 en y participant. Cette attitude fragilise le combat contre l’instrumentalisation du processus électoral et pose une question essentielle :

Peut-on combattre un système en acceptant ses règles, aussi biaisées soient-elles ? La vraie opposition ne devrait-elle pas boycotter toute élection basée sur une loi déclarée inconstitutionnelle et exiger un retour à la légitimité démocratique de la Constitution de 1990 ?

Vers un « État voyou » ?

Le refus du gouvernement d’exécuter l’arrêt de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples illustre un mépris inquiétant pour les principes de justice et de droit international. Patrice Talon lui-même, lorsqu’il était opposant en 2016, dénonçait un « État voyou » refusant d’appliquer des décisions de justice supranationales. Ironiquement, aujourd’hui c’est son propre gouvernement qui adopte cette posture, refusant de revenir à la Constitution de 1990, pourtant réaffirmée comme seule et unique norme valide par la juridiction africaine. Un État qui rejette les décisions de justice, manipule les lois et verrouille le jeu électoral ne peut être qualifié autrement que d’État autoritaire.

Le devoir de résistance du peuple

Face à cette situation, le peuple béninois doit se réveiller et revendiquer son droit fondamental à l’auto-détermination. La résistance citoyenne ne doit pas être seulement un slogan, mais une réalité. Les articles 34 et 66 de la Constitution de 1990 donnent aux citoyens le droit et le devoir de désobéir à toute autorité illégitime et de lutter pour le retour à l’État de droit.

Cela implique :

  • Un refus collectif de participer à un processus électoral frauduleux basé sur des lois illégitimes.
  • Une mobilisation populaire et pacifique pour exiger la restitution de la Constitution de 1990.
  • Une pression sur les instances internationales pour contraindre le gouvernement béninois à respecter l’arrêt de la Cour d’Arusha. Un peuple qui accepte passivement l’injustice scelle son propre destin.

Entre résignation et lutte pour la démocratie, un choix à faire.

Le Bénin est aujourd’hui à un tournant historique. Soit les citoyens acceptent une démocratie factice, où les élections ne sont que des mises en scène orchestrées par le pouvoir, soit ils revendiquent leur souveraineté en refusant d’être les complices d’un système illégal. Si les leaders politiques ont failli à leur mission de défense des intérêts du peuple, alors c’est aux citoyens eux-mêmes d’écrire l’avenir. Comme le disait Thomas Sankara : « Là où s’abat le découragement, s’élève la victoire des persévérants. » Le combat pour la démocratie n’est jamais terminé. Il ne tient qu’au peuple béninois de décider s’il veut être un acteur de son avenir, ou un spectateur impuissant d’un pouvoir confisqué.

✊ Le choix appartient à chacun.

M.K.L. Un citoyen engagé

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