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Ilalou Atikou: Le Conseiller rebelle qui ébranle la mouvance

Dans un paysage politique où la loyauté partisane même aveugle est souvent une règle d’or, Ilalou Atikou, élu local du Bloc Républicain (BR), vient de briser les codes. Socio-anthropologue de formation et conseiller communal, il s’est récemment illustré par des prises de position audacieuses, allant jusqu’à critiquer ouvertement les pratiques de son propre camp politique. Tel un cavalier solitaire dans un désert de compromis, il refuse d’être dompté par la peur ambiante. Quelle que soit l’issue, le débat est désormais ouvert. Atikou a brisé l’omerta et donné un visage à la dissidence interne.

NDLR/Tout est parti d’une chronique au titre évocateur, « Je suis Démocrate », puis par un soutien inattendu aux militants du parti d’opposition « Les Démocrates », où Atikou ne s’est pas contenté de murmurer son mécontentement. Il l’a crié haut et fort, sur les réseaux sociaux, et surtout, sur le terrain. Mais en politique, le courage a souvent un prix. Quelques heures après ses déclarations, un message d’alerte, supposément émis par lui, a envahi les réseaux : « Si vous n’avez plus de mes nouvelles, sachez que je suis déjà dans leurs mains. » Cet avertissement, aussi glaçant que symbolique, pose une question essentielle : jusqu’où peut aller la répression politique dans un régime qui se dit démocratique ?

Une chronique qui secoue la mouvance présidentielle

Dans sa chronique « Je suis Démocrate », Ilalou Atikou met à nu les contradictions du pouvoir. Il y dénonce une peur injustifiée du régime face à une opposition affaiblie : « Nous avons le gouvernement en soutien, les institutions en accompagnement, les 12 préfets au commandement, la quasi-totalité des maires à notre service… et pourtant, nous avons peur d’une opposition qui peine à exister. » Avec une ironie mordante, il souligne un paradoxe : « Après toutes ces réalisations asphaltées qui chantent les prouesses de la rupture, le régime panique dès que l’opposition veut parler au peuple. » Sa plume acerbe interpelle : le gouvernement serait-il conscient de ses propres limites ? Ou craint-il que le peuple, malgré les infrastructures et les grands projets, ne lui accorde plus sa confiance ?

La chronique de l’élu frondeur va plus loin. Elle dénonce une mouvance présidentielle en panne de légitimité, qui, faute d’adhésion populaire, choisit la répression plutôt que la confrontation électorale loyale. « Quand on a construit des marchés modernes aux femmes et des stades olympiques aux jeunes, est-ce normal d’avoir peur de les voir facilement conquis par l’opposition ? » Un questionnement brutal qui sonne comme un constat d’échec.

Ilalou Atikou, élu local du Bloc Républicain (BR)

Un message d’alerte qui inquiète

Quelques heures après cette sortie fracassante, un message inquiétant attribué à Ilalou Atikou fait son apparition : « Mon arrestation n’est qu’une question d’heures… Si vous n’avez plus de mes nouvelles, sachez que je suis déjà dans leurs mains. » La menace semble claire. Il n’est plus en sécurité. Ce n’est pas la première fois qu’un opposant ou un dissident fait l’objet d’une telle pression. Les arrestations politiques ciblées sont devenues une réalité sous ce régime, comme en témoigne l’évocation par Atikou du cas du frère Hounvi, arrêté au Togo. Loin d’être un simple cri de détresse, ce message est un acte de défiance. Il signifie : « je sais ce qui m’attend, mais je ne me tairai pas. » Une posture rare, surtout pour un membre de la mouvance présidentielle.

Quand la honte change de camp

Au-delà de la peur, Ilalou Atikou exprime un sentiment plus profond : la honte. Lors d’une déclaration publique face aux militants du parti Les Démocrates, il confesse : « Nous avons honte de ce qui vous arrive. » Ce n’est pas seulement une critique politique. C’est un désaveu moral, un aveu que beaucoup, dans la mouvance présidentielle, savent que ce qui se passe est inacceptable. Atikou ne parle pas en son seul nom. Il affirme que nombreux sont ceux qui partagent son malaise : « De plus en plus, nous sommes nombreux à avoir honte. » Il va même plus loin en dénonçant une stratégie électorale malhabile : « En vous interdisant de vous exprimer, ils vous font de la publicité. Et cette publicité, c’est vous qui gagnez. Nous, nous perdons. » Une déclaration qui tranche avec le discours officiel, où le pouvoir tente encore de justifier les interdictions de réunions publiques.

Les Démocrates : une opposition qui dérange ?

Pourquoi un parti comme Les Démocrates, qui ne détient qu’un tiers des sièges au Parlement, suscite-t-il autant d’inquiétude chez le pouvoir ? Atikou voit dans la répression un aveu de faiblesse : « Si la mouvance présidentielle était sûre d’elle, elle affronterait ses adversaires sur le terrain électoral et non dans les commissariats. » La situation rappelle les heures sombres des régimes autoritaires, où toute opposition structurée devient une menace à éliminer. Mais ce que le pouvoir ne semble pas mesurer, c’est que chaque répression renforce la légitimité des opprimés. Comme le dit Atikou : « Avec ces interdictions, nombreux sont ceux qui se sentent désormais DÉMOCRATES. »

Un futur incertain : jusqu’où ira la fronde ?

La posture d’Ilalou Atikou pose une question essentielle : sera-t-il le précurseur d’un mouvement plus large au sein du Bloc Républicain ? Son engagement rappelle ces figures politiques historiques qui, face à une injustice qu’ils ne pouvaient plus tolérer, ont choisi la dissidence au prix de leur carrière, voire de leur liberté. Il est possible que le pouvoir cherche à l’exclure du Bloc Républicain, voire à lui intenter des poursuites. Mais une chose est sûre : « Le ver est dans le fruit. » Si un membre influent de la mouvance présidentielle ose remettre en question publiquement les méthodes du régime, cela signifie que le malaise est bien plus profond qu’il n’y paraît.

Vers une recomposition du paysage politique ?

Les déclarations d’Ilalou Atikou interviennent à un moment critique pour la démocratie béninoise. Avec l’approche des prochaines élections, plusieurs scénarios se dessinent :

  1. Le régime persiste dans sa stratégie de verrouillage politique, avec le risque de radicaliser l’opposition et de provoquer des tensions sociales.
  2. Une fracture interne émerge au sein de la mouvance présidentielle, avec des voix dissidentes réclamant plus d’ouverture démocratique.
  3. Les Démocrates capitalisent sur la répression pour se renforcer politiquement et apparaître comme la seule alternative crédible.

Un acte de bravoure qui pourrait changer la donne

Avec ses prises de position courageuses, Ilalou Atikou a bousculé l’ordre établi. Il incarne désormais une voix dissidente au sein même du pouvoir, une anomalie dans un système où le silence est d’or. Sa sortie n’est pas simplement une critique politique, c’est une alarme : « La démocratie béninoise est en danger. Ceux qui ferment les yeux aujourd’hui devront en assumer les conséquences demain. » Quelle que soit l’issue, le débat est désormais ouvert. Atikou a brisé l’omerta. Dès lors, une question reste en suspens : Son cri d’alerte sera-t-il entendu, ou finira-t-il étouffé dans les méandres d’un système qu’il a osé défier ? Seul l’avenir nous le dira. Mais une chose est certaine : il a marqué les esprits.

—————————  LA CHRONOLOGIE DES FIFFERENTS ACTES —————

  •  MESSAGE D’ALERTE SUPPOSEMENT EMIS PAR LE CONSEILLER ILALOU ATIKO

«J’informe la communauté́ ici présente qu’il m’est parvenu des informations selon lesquelles mon arrestation n’est qu’une question d’heures. On m’a conseillé de me faire discret dans la journée. Je suis dans ma maison familiale à Ketou. Je n’irai nulle part et je vais vaquer à mes occupations sans craintes. Si vous n’avez plus de mes nouvelles sachez que je suis déjà̀ dans leurs mains. Pourvu que ce soit les services compétents de la police et non le commando qui est allé chercher le prétendu frère Hounvi à Lomé. En tout cas je suis encore avec vous pour l’instant qui m’est accordé. »

Conseiller ATIKOU

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(2) LA CHRONIQUE INTITULE : *JE SUIS DEMOCRATE* DU CONSEILLER DU PARTI BLOC REPUBLICAIN (PARTI SOUTENANT LES ACTIONS DU POUVOIR EN PLACE) POUR EXPRIMER SON RAS-LE-BOL.

*Je suis DEMOCRATE* 

« Quoique conseiller communal BR , je suis *DEMOCRATE* , et je me vois appelé au devoir citoyen de rappeler à tous les hommes politiques de la mouvance qui ont encore un peu de dignité dans l’âme et de l’honneur au combat , que le ridicule ne tue certainement pas les humains , mais ça tue leurs gloires. De quoi avons nous peur pour empêcher de façon grotesque et pitoyable le parti d’opposition d’exercer sa part d’animation de la vie politique ? Nous avons taillé le code électoral à notre convenance exclusive. Nous avons le gouvernement en soutien , les institutions de la république en accompagnement , les 12 préfets des départements au commandement , la quasi-totalité des maires des 77 communes à nos services , et nous nous apprêtons à désigner presque tous les chefs des quartiers et villages du Bénin. Puis je constate avec étonnement que malgré ces avantages comparatifs , nous avouons de façon la plus lâche notre incapacité à livrer un combat électoral en face d’une opposition qui tient seulement à peine le tiers des députés de l’assemblée. La peur bleue de la mouvance qui conduit depuis quelques jours à l’interdiction des activités du Parti Les Démocrates , est une honte intenable pour ceux qui se réclament de la rupture. À chaque fois que Les Démocrates annoncent une rencontre avec les populations , on a comme l’impression que le gouvernement et ses partisans y voient leur péril. De quoi a-t-on peur ? Après toutes ces réalisations asphaltées qui content les prouesses de la rupture , au lendemain des Vodun Days glorieux qui ont fait inscrire le Bénin sur la liste des destinations convoitées , en face de l’Amazone debout pour chanter l’hymne au triomphe de Agbonnon , avec le CHIC pour veiller sur la santé des béninois qui ont de chèque , ça étonne que la rupture panique encore à chaque fois que les opposants vont à la rencontre du peuple. Est-ce à dire que le gouvernement et ses partisans n’ont pas confiance en ces populations qu’ils ont tant servies ? Ou bien c’est le bilan qui est indéfendable en challenge avec l’opposition ? Quand on a construit des marchés modernes aux femmes et des stades olympiques aux jeunes , est-ce que on normal d’ avoir peur de les voir facilement conquis par l’opposition ? Il y a comme une réalité troublante qui ronge le gouvernement et sa mouvance , dont l’interdiction de manifestation de l’opposition est la révélation inconsciente. Oswald Homeky disait à son procès que dans le système , tout le monde connaît la vérité dans son cœur , mais chacun joue le rôle qu’on lui attribue. La vérité qui se trouve dans ces interdictions des activités politiques de l’opposition a débordé les cœurs et apparaît dehors sous la forme d’un aveu d’échec du gouvernement après 9 ans de gouvernance et de de la démission politique des partis qui l’accompagnent incapables de lui réaliser l’adhésion populaire malgré tous les avantages à eux accordés. À tous ceux à qui on a délégué un rôle dans le jeu malsain de ces interdictions dictatoriales, je leur conseille de savoir jouer leur partition avec humilité et humanité , car  le peuple demandera des comptes à un moment où ils s’y attendront le moins. Quant au parti Les Démocrates, je les encourage à faire face à cette violation de leur droit avec intelligence et stratégie puisque le but caché de tout ce stratagème peut être des opportunités recherchées pour arrêter et disqualifier par des condamnations programmées les personnes les plus en vue pour conduire les listes électorales de l’opposition. De toutes les façons , avec ces premières interdictions dictatoriales , nombreux sont ceux qui se sentent *DÉMOCRATES* par révolte contre une tyrannie insensée qui humilie le Bénin de la Conférence Nationale. Je me sens particulièrement *DEMOCRATE* par engagement citoyen et républicain, je me sens *DEMOCRATE* par honnêteté intellectuelle, par dignité humaine et par honneur et gloire au combat politique. Il apparaît dés lors que ces interdictions qui traduisent la déroute exprimée de la mouvance , travaille acharnement pour Les Démocrates , lorsque tous ceux qui ne veulent pas vivre dans un Bénin déstabilisé démocratiquement , décident d’abandonner la lutte de parti pour la lutte de la patrie. Désormais nous sommes tous *DEMOCRATES* pour que le Bénin se relève de cette rupture et brille de son aura démocratique originale ».

ATK !

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(3) LA DECLARATION DE MONSIEUR ILALOU ATIKOU, CONSEILLER DU PARTI BLOC REPUBLICAIN (PARTI SOUTENANT LES ACTIONS DU REGIME EN PLACE) ET QUI PREND FAIT ET CAUSES POUR LES MILITANTS DU PARTI DE L’OPPOSITION «LES DEMOCRATES»

 «D’abord, merci monsieur le journaliste. Je salue la présence ici de tous les militants et surtout les responsables du parti Les Démocrates. D’abord, je vous félicite pour votre comportement républicain et citoyen. On a piétiné votre droit, on a piétiné les libertés qui sont les vôtres, que la constitution vous concède, que les principes démocratiques vous concèdent, que l’état de droit vous concède. Malgré ça, vous êtes resté calme et vous avez fait preuve du respect de l’autorité républicaine. C’est un bon comportement. C’est vrai, que par les temps qui courent, la violation des droits accule les citoyens et peut les amener à avoir des comportements qui ne sont pas bien indiqués dans un état de droit. Mais par l’acte que vous venez de poser aujourd’hui, en respectant cette interdiction et en essayant de vous conformer à ce qui est exigé, vous avez posé un acte pédagogique pour l’éducation à la citoyenneté de développement.

Moi qui suis ici, je ne suis pas du parti Les Démocrates. Je suis un conseiller communal dans le plateau, un conseiller communal du Bloc républicain, dans le plateau précisément à Kétou. Si je suis là aujourd’hui, c’est pour vous apporter mon soutien. Dans la posture de victime que vous êtes, vous avez été victime de l’injustice.  Et cette injustice, ça peut atteindre quiconque. Si aujourd’hui, c’est parce que les démocrates que ça touche… et on ne réagit pas, le jour où ça va toucher les républicains, j’aurai le tort de réagir. C’est pourquoi je suis là. Je suis là aussi pour dire aux démocrates, la roue tourne. Ceux dont vous êtes victime aujourd’hui, ne produisez ça jamais. Ne soyez pas bourreau demain. Parce que vous savez ce que ressentent les victimes.

Vous avez été aujourd’hui dans la peau des victimes. Quand vous serez en position de force, ne vous érigez pas en bourreau. Comparer ce que ressentent les victimes. Et que ce vous vivez aujourd’hui à ce que vont vivre ceux avec qui vous allez vous montrer bourreau. C’est pour vous tirer cette leçon que je suis là. Et je vous dis que nous tous, la plupart surtout, je ne dirai pas nous tous, la plupart de nous, qui soutenons la mouvance présidentielle, nous avons honte de ce qui vous arrive. J’ai honte aujourd’hui. Parmi vous là, j’ai honte. Je suis venu vous dire que nous avons honte. Et nous sommes nombreux. De plus en plus, nombreux à avoir honte.

Nous avons les institutions. Nous avons ici dans le plateau 7 députés. Vous n’en avez aucun. Nous avons le préfet. Nous avons tous les maires du plateau. Qu’est-ce qui peut nous faire peur lorsque vous voulez rencontrer vos militants ? On n’en trouve pas. C’est de la lâcheté. L’acte qui est posé, ça humilie ceux qui soutiennent le gouvernement et ceux qui soutiennent l’action gouvernementale. Ceux qui soutiennent les partis qui sont de la mouvance ont honte. Parce que les gens sont en train de faire comme si nous ne sommes pas capables de vous affronter. Et ce faisant, ils vous font de la publicité. Et la publicité qu’ils sont en train de vous faire, c’est vous qui gagnez. Nous, nous perdons. Si je vous dis, le nombre de personnes de la mouvance qui m’ont écrit lorsque j’ai produit ma chronique que « je suis démocrate », qui m’ont écrit qu’ils le sont aussi, vous allez être étonnés. C’est pour joindre l’acte à ma chronique. Je ne suis pas un militant des droits de l’homme, un militant de l’État de droit « wathsappien « . Je suis quelqu’un qui le fait de façon active. C’est pourquoi je suis parmi vous, pour vous dire que nous avons honte.

Pardonnez-nous, nous ne savons pas ce que nous faisons ! Pardonnez-nous, nous ne savons pas ce que nous faisons ! C’est inadmissible !

Aujourd’hui, nous allons le combattre. Et toutes les fois que vous serez victime, dans le plateau ici, vous me verrez à côté de vous. Ça peut se passer ailleurs, sans qu’il n’y ait de l’émoi, sans que ça n’émeuve personne. Ici, dans le plateau, vous allez trouver des gens qui sont de la mouvance et que ça émeut. Je proclame encore qu’en tant que conseiller BR, j’ai honte de ce qui vous arrive. Demain, on peut m’enlever. On peut aller se réunir au Bureau politique et prendre toutes les dispositions. C’est avec fierté. Je ne regretterai jamais de vous avoir apporté mon soutien. Je ne suis pas encore membre du parti démocrate aujourd’hui, je peux le devenir demain, si votre cause, vous continuez de la défendre avec justesse. Je vous remercie».

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